Bégayer s'invente mieux entre villes et sommets. À mi chemin, comme on dit, de la misère et du soleil.
Entre autres choses, ils vivent seuls aux pieds des Alpes.
On y fait des chansons, du moins, à trois têtes: Loup Uberto, Lucas Ravinale et Alexis Vinéïs.
Pour le reste: chanson française, quelques nuances bruitistes, d'autres rumeurs de musiques lointaines.
Il y a des poèmes qui cherchent tantôt à faire les poubelles du monde, tantôt à soutenir que le possible et l'effectif sont une seule et même chose. Quelques instruments sauvages inspirés des factures d'Afrique et d'Asie, enfin des radios, amplificateurs modifiés, et d'autres petits objets électroniques.
« C’est fait de bouts de poèmes arrachées au silence et puis gueulés sur des durées impossibles. c'est une musique d'aveugle clairvoyant, comme le blues. on ne sait pas si c'est primitif ou d'avant-garde comme on dit à l'armée.
C’est aussi tout une langue, pauvre, nue et belle qui avance avec des ciseaux pour ajourer la vie contemplée, éprouvée, pour la révéler dans sa réversibilité à force d'épiphanies patientes.
C'est pas du patois pour rire, c'est le drame de la langue, jeté en plus sur de la musique en lambeaux. qu'est-ce qu'il reste du rock'n r'oll quand on lui a tout enlevé? du jazz quand on lui a tout enlevé? de la musique populaire quand on lui a tout enlevé? de la musique savante quand on lui a tout enlevé? il reste des bouts de trucs excitants comme un diable ivre, émus comme de la buée sur les lunettes d'une jeune femme amoureuse, immédiatement compréhensibles mais à tout jamais inexplicables, la possibilité d'une histoire touchée avec les mains dans le discontinu même du temps qui ment et qui mentant dit le vrai du vrai. Bégayer c'est un trio sachant tout très bien, d'instinct, avec les mains, du strip-tease musical et du suicide du sens et qui parvient avec ça, à fabriquer des bombes. »
Le L’fsèr cherche encore à creuser des routes qu’il ne connaît pas, il échoue joyeusement, car c’était l’objectif. Les randonneurs du jbel grenoblois mélangent les coutumes, mettent en circulation des objets inquiétants. On pourrait signer le succès d’une chanson de Bégayer à l’ampleur de sa bâtardise. Opacité des formes, mutisme de la langue, dérision du support sont autant de gestes contents.
"Un univers foisonnant, une liberté de ton, une folie présente dans les premiers Arlt, une musique de derviche tourneur fruste, dans le sens brute de décoffrage, mais dotée d’un pouvoir de sidération/séduction énorme." ADDICT-CULTURE